Trois années d’immersion vues par M. Bento

Suite à l’article “L’immersion en anglais, is it good for you?“, nous avons rencontré M. Bento, professeur d’histoire et de géographie.
 
Combien d’heures de cours donnez-vous en anglais par semaine ?
Cette année 12 heures/semaine.
 
Comment avez-vous appris l’anglais ?
À l’école d’abord, grâce aux cours mais aussi grâce à mon intérêt pour les chansons anglaises. J’essayais de traduire les paroles à l’aide d’un dictionnaire et je donnais ces traductions à mon prof pour qu’il les corrige. Ensuite grâce à la tenue d’une correspondance avec un ami tchèque rencontré lors d’un stage de basket. Puis au travail : j’ai d’abord travaillé dans une banque francophone où j’étais parfois en contact avec des clients américains ensuite dans une banque américaine où l’on parlait uniquement anglais. Enfin, grâce aux voyages que j’ai faits. J’ai séjourné quelque semaines dans la partie anglophone du Canada (Vancouver) et j’ai fait un voyage d’un an autour du monde, ce qui m’a encore permis de pratiquer l’anglais.
Utilisez-vous fréquemment l’anglais en dehors de l’école ?
Surtout de manière passive, lorsque je suis consommateur de contenu culturel anglophone. J’ai encore quelques amis anglophones avec qui j’exerce aussi mon anglais mais il est vrai que la plupart de ma pratique s’effectue dans le cadre de mon travail à l’école.
Préférez-vous donner cours en anglais ou en français ?
C’est vraiment différent, j’aime les deux mais chacun à sa manière. Le plus pour les cours en français c’est que c’est plus reposant pour moi, que j’ai plus de facilités à m’exprimer en français et j’ai plaisir à le parler car il s’agit de ma langue maternelle. Je suis aussi mieux compris, ce qui m’évite de devoir toujours trouver plusieurs formulations pour dire la même chose. Maintenant ces cours sont assez banals et routiniers. Le plus avec les cours d’anglais c’est que les élèves choisissent la difficulté et le challenge et que notre rôle est de les aider à réaliser ce défi. L’inconvénient est que l’on perd beaucoup de temps et qu’il est donc difficile de couvrir le programme en troisième année.
Quelles sont vos motivations à donner cours en immersion ?
J’aime cette langue et c’est pour moi l’occasion de m’exercer afin de ne pas la perdre. Ça me permet également de m’améliorer et de parfaire mon anglais.
Est-ce que donner cours en immersion demande une formation particulière ? (en dehors de la formation de prof et de la maîtrise de la langue)
Il n’y a pas vraiment de formation mais il y a une qualification : CCALI (certificat de connaissance approfondie d’une langue en vue de l’enseignement de cours en langue d’immersion). Il y a également des conseillers pédagogiques et une cellule immersion à qui on peut faire appel.
Lorsque vous avez voulu enseigner, vous imaginiez-vous donner cours en anglais ?
Non. C’est lors d’un stage au Collège que madame Gochet m’a parlé du projet sachant que j’avais une expérience professionnelle dans une société américaine.
Combien de professeurs participent à l’immersion ?
9 (il me semble) : une prof de math, une prof de science, une autre d’histoire, une de géo, moi et quatre profs d’anglais.
Voyez-vous des inconvénients au projet ?
Pour les élèves : on est plus lent au début mais on rattrape et peut-être une moins bonne maîtrise du français car des heures en plus en anglais sont aussi des heures en moins en français. Pour les profs c’est plus fatiguant et ça demande plus de travail et de temps car il n’y a pas de manuels pour les cours en immersion qui collent aux programmes de l’enseignement catholique.
Qu’est-ce qui pourrait/devrait être amélioré selon vous ?
L’immersion demande une bonne coordination entre professeurs. Même si l’importance de la coordination n’est pas propre à l’immersion, cela joue un rôle important si l’on souhaite pouvoir en tirer le meilleur. De même, certains collègues émettent des réserves, parfois justifiées, sur ce projet.
Notamment par rapport au français comme je l’ai déjà dit. Mais je crois qu’avec le temps, les résultats paieront.
D’après moi, le gros problème c’est la reconnaissance. Autant pour les élèves, à qui aucun diplôme n’est donné (pour que celui-ci soit reconnu, il faudrait qu’il y ait des examens externes, or nous ne pouvons pas orienter nos cours afin de les préparer), que pour les professeurs à qui on demande des compétences supplémentaires sans qu’elles soient valorisées dans la rémunération, alors que cela demande énormément d’énergie, de travail et de temps.
Quels conseils donneriez-vous à ceux qui veulent faire ce choix ?
Premièrement il faut que ce soit un intérêt personnel et non une obligation des parents ou l’envie d’être avec ses amis. Deuxièmement, il faut être prêt à travailler plus, à gagner en autonomie et à développer des stratégies pour apprendre.
Avez-vous autre chose à dire pour conclure l’interview ?
Maintenant que les premiers élèves sont en rhéto, j’espère qu’on a pu leur fournir ce qu’ils
sont venus chercher bien qu’ils aient dû essuyer les plâtres…
Anaïs Larue

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